Pourquoi les animaux mignons nous rendent-ils dingues ?

Pourquoi les animaux mignons nous rendent-ils dingues ?

Le 04/02/2013

Les photos ou vidéos d’animaux mignons et/ou rigolos vous donnent envie de crier « Aaaw » ? Vous êtes du genre à kidnapper un chaton pour le câliner même s’il n’est pas d’accord ? Justine vous parle de ces drôles de comportements.

Vous savez comme parfois, nous parlons un peu de sujets de fond, de faits d’actualité ou d’expériences célèbres ? Ne m’engueulez pas, mais aujourd’hui, ce ne sera pas le cas –  mais hé, il faut parfois des petits pas pour l’homme pour parvenir à de grandes enjambées pour l’humanité, hein ?

Figurez-vous que l’autre jour, en travaillant sur les rapports entre humains et animaux, je suis tombée sur une chouette expérience à propos de nos dark sides face à de petits animaux un peu trop mignons. Si vous êtes du genre à balancer à des chatons « Aaaaaawww, je vais te croquer » ou à avoir une envie irrépressible de serrer très fort de petits chiots, sachez que la science étudie votre cas.

Marquées par une conversation sur toutes ces images adorables d’animaux squattant l’Internet qui donnent envie de serrer dans nos bras les bestioles en question, Rebecca Dyer et Oriana Aragon, issues de l’Université de Yale, ont mené une étude sur nos réactions à ces images tromignonnes et ont partagé leurs trouvailles sur le sujet en janvier dernier, lors d’un congrès de la Society for Personality and Social Psychology.

Leur constat ? Certain-e-s d’entre nous auraient donc tendance à réagir de façon exagérée face à des animaux choupis ; et ces réactions pourraient montrer une part d’agressivité. Prends ça, mignonité ! Les deux chercheuses appellent ce phénomène la « cute aggression » – ce que l’on pourrait traduire par « l’agression du mignon » : nous ne souhaitons pas vraiment faire de mal aux animaux mignons, mais nous expérimentions une émotion agressive.
Comment on fait pour étudier ça ?

Pourquoi les animaux mignons nous rendent ils dingues ?

Pour parvenir à ce constat, Dyer et Aragon ont mené leur analyse en deux temps.
Dans une première phase d’expérience, on a demandé à 109 volontaires de regarder des photographies d’animaux soit mignons (par exemple, un chaton au poil bien soyeux qui s’endort), soit drôles (par exemple, un chien qui sort sa truffe d’une voiture en tirant la langue), soit neutres (autrement dit, un animal qui ne ferait rien de particulier).

Pour être certaines que les animaux sont bien mignons, drôles ou neutres pour les participant-e-s, les chercheuses demandent à ceux-ci d’évaluer les images sur leur degré de « mignonité » et de « drôlerie ». Ensuite, les individus doivent évaluer la « perte de contrôle » que ces images leur font ressentir, en notant leur accord ou leur désaccord avec des affirmations comme « Je ne peux pas le supporter », « Ça me donne envie de dire quelque chose comme « grrrrr » », « J’ai envie de presser quelque chose » – en gros, plus l’animal est perçu comme « mignon », moins les individus ont de contrôle et plus ils ont envie de dire « Grrrr » (ou « Aaaaaawwwwww », chacun son style) ou de presser quelque chose.

Les animaux drôles, quant à eux, reçoivent des scores inférieurs aux mignons, mais supérieurs aux neutres (pour le dire d’une autre manière, un animal rigolo vous fera moins dire « Grrrrr/Awwww » qu’un animal mignon, mais plus qu’un animal neutre).

BON. Pour pousser le questionnement un peu plus loin, les deux psychologues ont mobilisé 90 autres volontaires, qui ont également dû visionner des diapositives d’animaux mignons, rigolos ou neutres. Cette fois, on fait croire aux participant-e-s que l’étude porte sur l’activité motrice et la mémoire, et on leur donne du papier bulle – qu’ils et elles peuvent éclater à volonté. Après l’expérience, les chercheuses comptent le nombre de bulles écrasées selon la diapositive montrée (mignonne, rigolote, neutre).

Avec cette démarche, Dyer et Aragon souhaitent observer si les individus ont des réactions qui auraient un côté « agressif » face aux animaux mignons (auquel cas, ils péteraient plus de bulles) : selon leur « comptage », c’est effectivement le cas ! Ainsi, lorsque les participant-e-s voient une image mignonne, ils pressent en moyenne 120 bulles ; alors qu’ils en pètent 100 pour une image neutre et 80 pour une image drôle.

Pour les chercheuses, les trucs mignons provoqueraient donc un surplus d’agressivité et de tension.

Finalement, l’analyse de Dyer et Aragon est parvenue à faire un constat (nos réactions pourraient avoir quelque chose d’agressif face à un trop-plein de cuteness) mais n’affirme rien de péremptoire quant aux causes du phénomène. Les chercheuses ne sont pas certaines de la raison pour laquelle les animaux mignons nous poussent à exprimer un sentiment agressif (insistons en passant sur le « sentiment » : expérimenter un sentiment ou une émotion agressive ne crée pas nécessairement une action agressive), mais proposent quelques débuts de réponse. Peut-être ainsi que lorsque nous regardons ces images d’animaux un peu trop choupinets, cela créerait une sorte de frustration (nous aurions envie de nous en occuper et de leur faire des câlinous, mais nous ne pouvons pas), qui formerait à son tour une émotion agressive. Ou peut-être que, comme les enfants qui veulent tellement faire de câlins au chat qu’ils finissent par leur bousiller une vertèbre et se prendre un coup de griffe dans l’œil, ou comme Elmira des Tiny Toons, nous ne parvenons pas à maîtriser nos envies.

Dyer et Aragon suggèrent encore une autre explication possible : adopter un sentiment agressif pourrait être une manière de rétablir l’équilibre lorsque l’on fait l’expérience d’une émotion trop positive – le sentiment agressif permettrait de réguler, de rester calme.

Pour la prochaine fois, je propose qu’on donne du papier bulle lorsqu’on mate Javier Bardem. Ou Penelope Cruz. Ou Javier Bardem ET Penelope Cruz (auquel cas, sans vouloir la jouer médium, je pense que ça va être le festival du papier bulle pété).

Source : Madmozelle

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