Animaux maltraités: quand les industriels essaient d’étouffer leur monstrueuse réalité
Le 13/04/2013
Des lapins malades et blessés entassés dans des élevages en batterie. Des poules en cages déplumées n'ayant plus que la peau sur les os.
Des vaches qui reprennent conscience sur une chaîne d'abattage. Vous avez peut-être vu ces images au journal télévisé ou sur les réseaux sociaux. Elles montrent la production de viande telle que la vivent les animaux.
Témoigner de cette réalité est la mission que s'est donnée L214, qui enquête depuis 5 ans dans les élevages et les abattoirs français.
Les défenseurs des animaux passent pour des criminels
Aux yeux de la justice américaine, le travail que nous menons est désormais un crime.
Filmer sans autorisation dans les élevages et abattoirs et participer à la diffusion des images ainsi recueillies est à présent punissable de prison et de lourdes amendes dans trois États agricoles des États-Unis (Iowa, Utah, Missouri). Des lois similaires sont en projet ou déjà en discussion dans une dizaine d’autres.
Autrement dit : des conditions d’élevage et d’abattage des animaux, les citoyens ne sauront que ce que l’industrie de la viande veut bien leur montrer.
Qu'en est-il, en Europe, de la liberté d'informer de ce que vivent les animaux dans les élevages ? Aucun pays n'a encore légiféré contre le droit des consommateurs, à savoir ce qu'il se passe dans les élevages et les abattoirs. Mais les tentatives de répression ont déjà commencé.
En Autriche, l’État a tenté pendant trois ans de criminaliser une ONG pacifique, l'association contre les élevages intensifs VGT, allant jusqu'à utiliser une loi destinée à lutter contre le terrorisme et le crime organisé pour inculper des responsables associatifs d'une série de délits extravagants. Au terme d'un procès largement médiatisé, l'affaire s'est terminée en 2011 par une relaxe générale.
En Espagne, vingt-cinq personnes font actuellement l'objet d'un procès inique visant l'association Igualdad Animal, qui a notamment documenté la cruauté inhérente aux élevages de porcs pour la viande, de visons pour la fourrure, ou au gavage des canards.
Derrière les murs des abattoirs
Que retenir de cette ardeur à tenir la société civile en dehors des affaires de l'industrie de la viande ? C'est simple : derrière les murs des élevages et des abattoirs se déroule une réalité quotidienne que le grand public trouve choquante et glauque. Une réalité qui nuit grandement à l'image des entreprises concernées à chaque médiatisation.
Jusqu'à présent, les groupes de pression agricoles exercent un lobbying efficace visant à inverser les rôles : criminaliser les protecteurs des animaux et mettre en sûreté l'industrie et tous ceux dont l'activité économique repose sur l'exploitation des animaux.
Des contrôles très insuffisants
En France, depuis l'affaire de la viande de cheval, nos élus ont invariablement recours à une formule magique : "traçabilité". Entendre par là qu'ils sont favorables à l'indication du lieu d'élevage et d'abattage des animaux, comme si la seule origine "France" portait la garantie de pratiques respectables.
En réalité, nos représentants politiques trahissent leurs véritables intentions chaque fois qu'ils évoquent leur volonté d'"apaiser les consommateurs". Pendant ce temps, la nécessité de réformer l'élevage ou modifier les habitudes alimentaires reste absente de leurs discours.
Les personnes sensibles aux conditions de vie des animaux ont des raisons d'être inquiètes. Les contrôles des normes minimales de protection animale par les autorités françaises sont très largement insuffisants : ils devraient être systématiques.
La monstrueuse normalité des élevages
A L214, nous ne nous concentrons pas sur les cas particuliers d’employés sadiques ou d’éleveurs négligents. Nous tenons à monter la normalité de l’élevage : que ce soit le ramassage des dindes, le gavage des canards, le transport des chevreaux… La "normalité" est monstrueuse.
En France, l’industrie fait ce qu’elle peut pour s’opposer à la diffusion de nos images. Elle a déjà obtenu la condamnation de L214 à faire disparaître des vidéos d'enquêtes obtenues sans autorisation.
S'ils sont encore considérés comme des "propriétés", les animaux sont avant tout des êtres sensibles. Parce qu'ils sont à notre merci, la condition qui leur est faite nous regarde. Chacun d'entre nous.
Source : Le Nouvel Obs